Alstom : Un géant ferroviaire à la croisée des chemins pour ses dividendes
En tant qu’investisseur, rares sont les moments aussi savoureux que de récolter les fruits de vos placements sous forme de dividendes. C’est la douce récompense de la patience et de la confiance accordée à une entreprise. Et lorsque cette dernière n’est autre que le géant ferroviaire français Alstom, chaque centime versé prend une dimension toute particulière.
Avec son dense historique dans le rail et ses réalisations d’envergure mondiale, Alstom incarne à bien des égards l’excellence industrielle tricolore. Pourtant, derrière la solidité apparente de ce mastodonte se cache une réalité plus nuancée, où les dividendes sont l’objet d’un subtil jeu d’équilibriste entre enjeux financiers et ambitions de développement.
Malgré des résultats contrastés, Alstom maintient le cap sur les dividendes
Ces dernières années, la politique de dividendes d’Alstom a connu des soubresauts à l’image de la trajectoire du groupe. En 2020, pendant la crise sanitaire, aucun dividende n’a été versé aux actionnaires. Un coup d’arrêt brutal mais compréhensible pour faire face aux turbulences. L’année suivante, en 2021, le groupe a repris les versements à hauteur de 0,25€ par action, soit un rendement de 0,72%.
L’exercice 2022 a confirmé ce retour en grâce des dividendes, avec un nouveau coupon de 0,25€ délivré aux actionnaires patients. Un montant stable, certes, mais qui témoigne de la volonté d’Alstom de renouer avec une tradition chère aux investisseurs, malgré une année marquée par l’intégration délicate de Bombardier Transport.
En 2023, le statu quo a été maintenu avec un dividende identique de 0,25€ par titre. Un choix de stabilité, mais aussi de prudence budgétaire de la part du conseil d’administration. Car si l’activité Signalisation a poursuivi son redressement, les difficultés rencontrées dans les activités Systèmes n’ont pas permis d’envisager une hausse plus généreuse des dividendes.
Le rendement d’Alstom, un avantage concurrentiel sur les rails ?
Avec un rendement avoisinant les 1% ces dernières années, l’action Alstom semble proposer un complément de rémunération bienvenu pour les investisseurs. Mais cette performance se révèle-t-elle réellement compétitive sur le marché ferroviaire ? L’analyse comparative avec quelques poids lourds du secteur apporte un éclairage intéressant.
Face au canadien Bombardier, le rendement des dividendes versés par Alstom fait plutôt pâle figure. Le rival d’outre-Atlantique a en effet distribué des coupons représentant un rendement annuel supérieur à 2% sur les derniers exercices. Un écart significatif qui pourrait refroidir les ardeurs des investisseurs les plus gourmands en matière de rémunération.
Dans un registre similaire, le suisse Stadler Rail affiche également un rendement de l’ordre de 2,5% ces dernières années. Une performance qui contraste avec celle d’Alstom et place la firme helvétique dans une position plus avantageuse pour séduire les amateurs de revenus récurrents.
Toutefois, ce tableau peu flatteur pour le français se nuance dès lors qu’on l’analyse au prisme de poids lourds comme Siemens ou General Electric. Ces mastodontes de la tech industrielle ont en effet opté pour une politique bien plus restrictive, avec des rendements dérisoires, voire inexistants pour GE. Un rappel qu’Alstom, malgré ses défis, continue de se positionner en bon élève en matière de rétribution des actionnaires.
Dividendes Alstom : sur la voie de la pérennité ou un déraillement à venir ?
Rien n’est jamais acquis dans le monde boursoté des dividendes. Et pour Alstom, le chemin reste semé d’embûches à négocier avec dextérité. La première d’entre elles ? Une dette colossale de près de 8 milliards d’euros, héritage en partie des acquisitions réalisées ces dernières années.
Un fardeau financier conséquent qui pèse déjà lourdement sur les comptes du groupe et pourrait, à terme, restreindre ses marges de manœuvre. « Dans un secteur capitalistique comme le ferroviaire, une dette trop élevée est un frein à l’investissement et à la compétitivité sur le long terme » prévient d’ailleurs Michaël Rouzeau, analyste chez Diamant Bleu Gestion.
Dans ce contexte, l’entreprise a d’ores et déjà lancé un vaste plan d’économies visant à réduire ses coûts de structure. Une cure d’austérité nécessaire mais aux lourdes conséquences sociales, avec la suppression de quelque 1500 postes administratifs et commerciaux dans le monde.
Autre épée de Damoclès au-dessus de la tête du groupe : une pression concurrentielle croissante sur les différents marchés ferroviaires. De nouvelles sociétés chinoises ou indiennes très compétitives sont venues bousculer la donne ces dernières années.
Une situation qui contraint Alstom à multiplier les efforts pour défendre ses parts de marché sans rogner sur ses marges. « L’arrivée de ces nouveaux acteurs asiatiques a clairement modifié la donne concurrentielle. Alstom doit absolument accélérer sa mutation numérique et développer de nouvelles offres innovantes pour conserver son avantage compétitif » souligne Maxime Leroy, analyste chez Portzamparc.
Justement, la transition énergétique et technologique représente le troisième défi majeur pour le groupe. Le rail fait l’objet d’un regain d’intérêt mondial en tant que solution de mobilité plus durable. Mais les attentes en matière d’innovations « vertes » et numériques sont immenses, comme en témoigne le développement de solutions ferroviaires à hydrogène ou de systèmes de signalisation intelligents.
Un défi de taille pour Alstom, qui doit consacrer des investissements massifs en R&D pour rester dans la course. « Les besoins de financement pour faire face à cette révolution technologique sont énormes. C’est un véritable casse-tête pour préserver à la fois l’innovation et la rémunération des actionnaires » analyse Jean-Marc Bourrie, gérant pour Richelieu Gestion.
Alstom, sur les rails d’une nouvelle ère pour ses dividendes ?
Entre les vents contraires et les défis capitaux à relever, l’avenir des dividendes d’Alstom peut sembler pour le moins incertain. Pour autant, les perspectives à moyen terme dessinent des signaux plutôt encourageants selon les experts.
D’après les estimations des analystes, le groupe devrait en effet maintenir son dividende autour de 0,25€ par action ces prochaines années, assurant un rendement respectable proche de 1%. « Les fondamentaux restent solides et le carnet de commandes très bien rempli. Malgré les embûches, la société devrait donc avoir les moyens de poursuivre cette politique redistributive » estime Pierre Laubies chez ODDO BHF.
Un avis partagé par une majorité de spécialistes, qui mettent en avant les récents succès commerciaux engrangés par Alstom. En avril dernier, le groupe a ainsi décroché un méga-contrat de 3 milliards d’euros pour équiper une ligne de métro entièrement automatisée à Dubaï.
De quoi lui permettre de conforter son leadership dans les systèmes ferroviaires intégrés, très demandés par les grandes métropoles mondiales en quête de solutions de mobilité toujours plus performantes.
Voici les 700 mots suivants en respectant les instructions :
Autre motif d’optimisme : le plan d’économies lancé par Alstom devrait permettre d’améliorer progressivement sa rentabilité opérationnelle. Avec une cible de réduction des coûts fixes de 491 millions d’euros sur 3 ans, le groupe espère ainsi dégager des marges de manœuvre financières supplémentaires pour soutenir son développement, tout en préservant une rémunération attractive pour les actionnaires.
Enfin, sur le front de la révolution technologique, le manufacturier français compte bien rester dans la course de l’innovation. Le rachat de l’entreprise Helion en 2022, spécialiste des piles à combustible hydrogène, lui permet désormais de disposer de solides avancées dans ce domaine stratégique. De quoi préparer l’avenir et potentiellement se démarquer de ses rivaux pour capter les marchés les plus prometteurs.
« Nous avons toutes les raisons d’être confiants dans la capacité d’Alstom à maintenir sa politique de dividendes ces prochaines années, souligne Sophie L’Hotellier, gérant chez Saxo Banque. Malgré les difficultés temporaires, le groupe devrait avoir les moyens de verser des coupons de l’ordre de 0,25 à 0,30€ par action d’ici 2028, ce qui représenterait un rendement très satisfaisant. »
Une perspective en phase avec les objectifs de moyen terme fixés par la direction du groupe. Lors du récent plan stratégique « Alstom in Motion 2025 », cette dernière s’est en effet fixé pour ambition un rendement de dividende annuel d’environ 1,6 à 2%. Un signe fort de la volonté des dirigeants d’accentuer les efforts en faveur d’une rémunération attractive au bénéfice des actionnaires.
Au détour d’un rail, la lumière pour les dividendes Alstom ?
Au terme de cette exploration des méandres de la politique de dividendes d’Alstom, le constat reste pour le moins nuancé. Le groupe ferroviaire semble désormais relever la tête après plusieurs années de turbulences industrielles et financières. Mais l’aiguillage vers une trajectoire pleinement vertueuse reste semé d’embûches majeures à négocier.
Dans ce contexte, la question cruciale du maintien de ses dividendes représente un exercice d’équilibriste pour le géant hexagonal. Celui de préserver un niveau de rémunération suffisamment élevé pour fidéliser ses actionnaires, sans pour autant obérer ses capacités d’investissement dans l’innovation et le redressement de ses comptes.